Les travailleurs pauvres, ce magnifique oxymore
CHRONIQUES Paul Hermant
Pour tout vous avouer, ces derniers temps j’ai beaucoup ruminé. Depuis, en fait, que l’on m’a demandé de reprendre mon collier de chroniqueur quotidien pour quelques jours à l’occasion de cette semaine sur la pauvreté. Et j’avoue donc que je suis fort ennuyé parce que plutôt que de la pauvreté, c’est du travail que j’aurais voulu parler.
Notez bien que, dans notre pays de bonne humeur, il est désormais possible de faire les deux à la fois car si travail et pauvreté ne riment pas, désormais, on les voit souvent aller ensemble. Et donc je m’en vais consacrer ces cinq chroniques à cet oxymore magnifique, qui a déjà un passé glorieux et qui, n’en doutons pas, jouira aussi d’un avenir radieux : je veux parler des travailleurs pauvres.
Un oxymore, vous savez ce que c’est. C’est faire aller ensemble des termes contradictoires. Par exemple, un silence assourdissant, ça ne se peut pas. Par exemple, une luxueuse austérité non plus ça ne se peut pas. Pourtant nous voyons exactement où l’on veut nous mener quand on nous dit ça. Et donc quand on nous parle de travailleurs pauvres, nous comprenons tout de suite qu’on a beau faire partie de la Belgique qui se lève tôt, ce n’est pas pour autant qu’on sait toujours où coucher le soir.
Aujourd’hui, 4,5% des travailleurs sont limite, juste au-dessus, juste en-dessous, du seuil de pauvreté, environ 1000 euros par mois pour un isolé. 4,5%, ce n’est peut-être pas grand-chose, mais ça fait tout de même 220.000 personnes et selon le Service de Lutte contre la Pauvreté, la Précarité et l’Exclusion sociale, si l’on reporte tout cela sur la population âgée de 18 à 65 ans, cela fait aussi 24% des gens qui, en travaillant, vivent dans le risque de la pauvreté… Cette pauvreté là ne se dit pas. Elle est compliquée à faire parler.
Alors, parfois, on parle d’elle. Tenez, j’ai lu un article qui en traitait. Durement. Âprement. Il se terminait par cette phrase : » Il est peut-être un peu fort d’affirmer que la précarité fait partie ou est une conséquence d’un régime politique, mais en Belgique, c’est en tout cas un choix politique « . Un constat implacable, s’ajoutant à des observations et des remarques du genre : » Dès qu’une crise apparaît, le législateur a recours à des mesures temporaires.
La majorité d’entre elles sont cependant permanentes et l’appareil législatif débouche sur une déconstruction du droit du travail. Avec la complicité du législateur, nous évoluons d’une sécurité de l’emploi (relative) vers une grande incertitude « . Je n’ai pas lu ça dans une feuille d’un comité de chômeurs ou dans le journal d’une association de précaires. Non, cet article qui signale aussi qu’ » Une culture de l’aléatoire est créée dans laquelle on vit au jour le jour » figure dans le dernier annuaire de la » Pauvreté en Belgique « , paru en septembre dernier et mis en œuvre par le SPP Intégration sociale.
Le SPP Intégration sociale est un service public fédéral et la préface est signée Maggie de Block qui s’y engage à faire connaître ces conclusions à tous ses collègues. Ah, c’est bien de finir la première chronique de la semaine avec l’idée que déjà nous sommes d’accord, le gouvernement et moi, et que nous partageons la même information. Et c’est beau de se dire que nous en savons plus sur les causes de la pauvreté au travail que, par exemple, sur les raisons de la faillite de Dexia ou sur qui est responsable de la chute de Fortis… Avec ça, on devrait donc pouvoir avancer, non ? Nous verrons ça demain.
Paul Hermant
Version audio
Article: RTBF.be
bonjour à tous,
un ensemble de sentiments différents me traversent, la joie, la tristesse, la rage, l’espoir mais tout cela mélangé fait une drôle de mixture. La joie de réentendre notre Paul national. La
tristesse de sentir la situation s’empirer pour les plus démunis mais aussi pour les autres, ceux qui de temps à autre donne une pièce à un mendiant ou font preuve de sollicitude envers d’autres
et qui risque, avec les politiques misent en place actuellement, de se retrouver dans la même situation que les personnes qu’elles aidaient avant. La rage de voir que depuis des années, les
sonnettes d’alarmes sont tirées par différents acteurs de la société et que les choses ne vont qu’en s’aggravant. L’espoir, en écoutant autour de moi les gens dire « on ne peut pas laisser faire
ça ».
Pour rebondir sur la réflexion de Paul, dans le plan de lutte contre la pauvreté édité par le service public de programmation (SPP intégration sociale et sa secrétaire d’état Maggie 2 blocks), il
est écrit pendant plusieurs pages, qu’un des instrument pour sortir de la pauvreté est l’emploi et un peu plus loin dans le même rapport, de constater qu’il y a des travailleurs pauvres. n’est-ce
pas là un non-sens ,surtout que l’on se doute bien que les gens qui pourraient éventuellement sortir de leur pauvreté par le travail, vont trouver un emploi bien rémunéré directement. Il faut
arrêter de nous prendre pour des ignares qui ne sont pas capable de réfléchir.
La pauvreté est un problème global et tant que les « »MARCHéS » (beurk) décidront pour l’humain, celui-ci ne sera qu’une marchandise pour eux, un produit marchandable pour le bénéfice de cert(un)s
ou deux peut-être.
Belle journée quand même et surtout ne lâchons rien.
Père Olivier