06 Question de Mme Zoé Genot à la vice-première ministre et ministre de l’Emploi et de l’Égalité des chances, chargée de la Politique de migration et d’asile, sur « l’étude de l’ONEm sur la trajectoire des personnes exclues du chômage » (n° 2186)
06.01 Zoé Genot (Ecolo-Groen !) : Madame la ministre, plusieurs fois dans cette commission, nous avons pu nous pencher sur les chiffres des études, en particulier ceux sur les exclus du chômage. Certains étaient identifiés comme ayant retrouvé de l’emploi, d’autres comme étant en formation, d’autres au CPAS. Cependant, certains d’entre eux avaient disparu : on ignorait leur situation, leurs sources de revenus, on ne savait pas s’ils avaient encore un statut.
Il y a presque deux ans, le 25 mars 2009, je vous interrogeais sur les conséquences sur les CPAS des exclusions de chômeurs. Vous m’avez répondu ce qui suit : « J’ai demandé à l’ONEM qui travaille avec un organisme externe de me remettre une étude sur deux axes. D’abord étudier précisément la trajectoire des exclus après signification de leur exclusion. Il s’agira de le faire en interrogeant les personnes, en leur téléphonant. J’aimerais voir clair sur cette problématique qui avait déjà été envisagée avec Marie Arena. Ici un service extérieur pourrait prendre contact avec le groupe cible afin d’obtenir des données scientifiques.
Deuxièmement, analyser les entretiens d’exclusion, répertorier les motifs, suivre les méthodes utilisées, étudier les dossiers afin de trouver la source d’éventuels problèmes et leur solution. Faudrait-il de la formation complémentaire ? Un renforcement de personnel aiderait-il à résoudre le problème ? J’aimerais beaucoup voir clair sur cette double problématique et c’est ce que j’ai demandé à l’ONEM. »
C’est ce que vous me répondiez en mars 2009. Dispose-t-on aujourd’hui de cette étude avec ces deux facettes (que sont devenus les exclus et l’analyse des entretiens d’exclusion) ? Pourrait-on en disposer ?
06.02 Joëlle Milquet, ministre : Nous avons reçu un rapport de la part de l’ONEM sur la trajectoire des personnes exclues à l’occasion du suivi du comportement de recherche d’emploi. Cette étude se trouve sur le site et reprend diverses constatations. On a constaté notamment que le passage vers le travail se fait dans le trimestre qui suit la sanction pour 12 % des personnes et dans l’année pour 20 % des personnes, que la réduction des allocations est la sanction qui amène le plus souvent les demandeurs d’emploi à retrouver du travail. Au sujet de la transition vers les CPAS, l’étude indique pour les deux groupes observés des taux de 8 à 10 % de sortie vers les CPAS dans le trimestre suivant la sanction et de 5 à 8 % un an après la sanction.
C’est le problème que vous évoquiez tout à l’heure : une proportion importante de personnes exclues ne se retrouve nulle part et passe à un statut « inconnu » auprès des banques de données de la sécurité sociale. Soit ces personnes sont prises en charge par la famille, conjoint ou autres ; soit souvent pour les jeunes, elles opèrent un retour au domicile parental. Il y a là des données qui confortent ce que nous avions déjà dit précédemment.
Il convient de déterminer, par rapport à ces personnes non dotées d’un statut réel, si les jeunes, deux ou trois années plus tard, reprennent des études, etc. Certes, il faudrait sans doute peaufiner en la matière.
L’autre problème rencontré dans la recherche effectuée à l’égard des personnes est celui d’un grand nombre d’exclusions définitives, qui sont souvent dues à des absences aux convocations. Dès lors, il n’est pas toujours possible d’identifier les facteurs liés au déroulement de l’entretien. Selon l’expérience des facilitateurs de l’ONEM, le motif de l’évaluation négative, dans la majorité des troisièmes entretiens effectifs menant à des exclusions, est celui selon lequel le chômeur n’a pas du tout ou très peu respecté le contrat établi lors de l’entretien précédent. C’est l’élément qui est généralement le plus invoqué par les différents services.
Par ailleurs, une sorte d’évaluation permanente est organisée au niveau de l’ONEM via une consultation régulière des directeurs et des coordinateurs facilitateurs. Les mesures correctrices nécessaires sont régulièrement communiquées aux bureaux régionaux.
En ce qui concerne l’analyse précédant les exclusions, les facilitateurs se rencontrent, tous les mois ou toutes les six semaines, au niveau de l’ONEM. Ces réunions se déroulent en demi-journées de travail assez bien organisées, où chacun fait état de ses expériences, de la manière dont il répond à des cas et l’on essaie d’harmoniser l’ensemble. Certaines pratiques évoluent et certains bureaux sont plus enclins à accepter tel argument plutôt qu’un autre. Un échange a ainsi lieu entre les différents directeurs pour essayer d’harmoniser la situation. En général, elle l’est en positif plutôt qu’en négatif.
06.03 Zoé Genot (Ecolo-Groen !) : Je prendrai connaissance de cette étude, mais je suis quelque peu déçue, car on avait parlé d’une étude axée sur la question de ces disparus. On avait déjà évoqué la problématique avec Mme Arena. Voilà des années que l’on en discute de cette problématique.
06.04 Joëlle Milquet, ministre : L’étude de Mme Arena à l’époque visait à cibler le suivi une fois ces personnes émargeant au CPAS. Personnellement, je possède l’étude relative aux aspects « retour au travail ».
06.05 Zoé Genot (Ecolo-Groen !) : Mais il y avait le même trou noir sur la question de savoir ce que deviennent les gens qui ne sont ni au CPAS ni à l’emploi. Cela fait des années que l’on dit que l’on va examiner ce trou noir.
Ma grande inquiétude est que, comme ces gens sont sans statut et souvent sans mutuelle, travaillant au noir, dépendant de la solidarité familiale et rentrant dans des systèmes où l’on se prête sa carte SIS, etc., l’on crée une catégorie d’illégaux dans la société belge, catégorie qui est particulièrement fragilisée et sujette à la précarité et au décrochage à tous moments.
Il suffit que le soutien familial fasse défaut à un moment pour que les gens se retrouvent SDF. Que deviennent ces disparus est une véritable question et elle nécessiterait une étude d’un organisme spécialisé pour travailler avec les plus précaires. Manifestement, cela n’a toujours pas été fait, alors qu’on nous l’a promis à de multiples reprises depuis plusieurs années. C’est un peu dommage.
06.06 Joëlle Milquet, ministre : Je vais me renseigner pour savoir si des compléments d’études ont été faits dans l’autre administration.
[Chambre des représentants – Commission des Affaires sociales – Réunion du 8 février 2011 – Extrait du compte rendu intégral (CRIV 53 – COM 0122)]
Article : zoegenot.be
En attendant : surtout, SURTOUT, ne lâchez rien !