Que faut-il craindre de la réforme du Forem ?
Article Lesoir.be
LORENT,PASCAL
Wallonie Le ministre André Antoine (CDH) tente de rassurer
Le Forem va-t-il profiter de la généralisation de l’accompagnement individualisé des chômeurs – un seul interlocuteur pour chaque demandeur d’emploi – pour créer des catégories et « refiler » les cas les plus difficiles aux CPAS (Le Soir du 11 janvier) ? Une hypothèse démentie par le ministre wallon de l’Emploi. André Antoine (CDH) l’a répété ce lundi, en présence de Basilio Napoli, directeur général de Forem Conseil. « L’ambition de cette réforme est de ne laisser personne sur le bord du chemin ». Le ministre a-t-il pour autant dissipé toutes les inquiétudes ? Non.
1Va-t-on créer des catégories de chômeur ? Soit « Proches de l’emploi », « Pas très éloignés », « Éloignés » et « MMPP » (les personnes présentant des problèmes de nature médicale, mentale, psychique ou psychiatrique). Non, jure le ministre : ce ne sont pas des catégories de chômeurs mais des parcours vers l’emploi. A priori, c’est du pareil au même : on segmente la masse des chômeurs et on place chacun dans le parcours (formation et recherche d’emploi) correspondant à l’« étiquette » attribuée par son référent. « Le plan d’action proposé au chômeur sera évolutif. Le chômeur ne sera pas enfermé dans une segmentation », insiste le ministre. Qui souligne que l’aide à offrir à un universitaire fraîchement diplômé et à un jeune qui a échoué dans le professionnel n’est pas identique. « Celui qui cumule les difficultés a davantage besoin du Forem ».
2Le but est-il de se débarrasser des cas les plus difficiles ? André Antoine dément. Face aux personnes présentant des problèmes médicaux, psychologiques ou psychiatriques, explique-t-il, l’objectif est d’abord de résoudre ceux-ci. Ainsi un toxicomane doit d’abord être soigné avant d’espérer reprendre une formation puis chercher un emploi. L’agent-référent du Forem devra donc orienter la personne vers le service public le plus approprié. Le CPAS dans certains cas. Mais pas question d’exclure ces gens du système des allocations de chômage pour les faire basculer au revenu minimum d’insertion, assure le ministre. Le Forem n’en a d’ailleurs pas la possibilité, cette compétence restant fédérale. Une expérience-pilote a été menée sur Namur et Liège : le Forem a recruté des assistants sociaux pour accompagner ces publics et les orienter. Sur 725 dossiers examinés, 681 ont été pris en charge par le service social du Forem, 474 sont toujours suivis et 10 personnes seulement ont été dirigées vers le CPAS.
3Veut-on les sortir des statistiques du chômage ? Ce n’est pas le but de la réforme. Mais rien ne permet de l’exclure. Dans le futur, un gouvernement pourrait décider que ces chômeurs doivent surmonter leurs « problèmes » avant d’être repris dans les chiffres officiels. Lesquels refléteront alors la demande d’emploi et plus le non-emploi.
4L’accompagnement protège-t-il le chômeur de la sanction de l’Onem ? « Nous avions passé un accord en ce sens avec la ministre fédérale de l’Emploi mais, faute de gouvernement, il n’a pu être mis en œuvre », regrette André Antoine. Néanmoins, l’administrateur général de l’Onem a donné consigne à ses agents de faire preuve de souplesse vis-à-vis des publics les plus éloignés de l’emploi.
5Le Forem a-t-il assez de moyens ? André Antoine et Basilio Napoli l’affirment. La mesure a été lancée voici un an, avec un nombre croissant de référents (257 au départ, 454 actuellement) et 99.983 chômeurs ont ainsi été suivis (en priorité, les jeunes sortant de l’école). Et pour juin, moment de l’évaluation du dispositif, le Forem affectera 617 agents à l’accompagnement individualisé des chômeurs, pour atteindre 700 référents en décembre. Un maximum, estime André Antoine. Toutefois, pour que la mesure soit payante, il faut que l’emploi suive. Or dans certaines régions (Liège, Charleroi, Mons, Centre), il y a parfois une offre pour vingt chômeurs. Et contre cela, le Forem ne peut rien.