Le travail comme sport de combat…

On dirait bien aujourd’hui que le monde du travail marche sur sa tête et qu’il s’aide pour marcher d’une batte de base-ball.

Cette semaine de carnaval qui s’ouvrit comme d’habitude par des bacchanales pour se terminer, comme d’ordinaire, par un jeûne ne pouvait mieux donner sa mesure.

On connaît la formule :  » Dites-moi ce dont vous avez besoin et je vous expliquerai comment vous en passer « . Alors, on a fait maigre. Et on a communié comme tout le monde à l’austérité et si on ne comprenait pas tout de suite, on nous l’expliquait au moins deux fois.

Tenez, le Syndicat national des Indépendants, le SNI, nous surprit ainsi le vendredi et réitéra le samedi. Vendredi, il appelait les employeurs à dénoncer les chômeurs non motivés, venus postuler pour un emploi qu’ils n’auront pas.

Le samedi, il se demandait pourquoi les travailleurs malades ne se chargeraient pas de financer eux-mêmes leur premier jour de maladie.

Le SNI, on le comprend, est méfiant. Il voit bien d’où vient la menace sur notre bien-être : elle vient du chômeur à l’activation peu motivante pour qui l’emploi est un postulat et la recherche un apostolat et qui veut juste une attestation signée de son futur non-employeur, un peu comme dans  » Intouchables  » si vous avez vu.

Elle vient aussi, la menace, de l’employé grippé qui a sans doute refilé cinq euros à ce désormais illustre inconnu de médecin grippe-sous bruxellois pour passer le pic de l’épidémie.

Le SNI, renversant la charge de la preuve, déclara donc tout juste avant le week-end le lampiste coupable — forcément coupable — de forfaiture sociale.

Et c’était un peu comme si l’hôpital se moquait de la charité, parce que tout de même, pour un secteur sur lequel la précarité tombe comme à Gravelotte, chercher des poux à plus pauvre que soi, ça ressemblait tout de même à préférer braquer le sac de la vieille que d’oser aller, sur la façade, décrocher l’enseigne de Dexia.

C’était effectivement assez violent comme charge et ça laissait ouvert notre week-end. Et ça n’a pas manqué — il était écrit que Carnaval déchaînerait les instincts premiers — et des tas de types déguisés en néonervis allemands ont passé la frontière pour envahir les locaux de l’entreprise Meister — quel nom tout de même ! — afin de contribuer avec des arguments contondants à la délocalisation de nos législations sociales et judiciaires.

On a tous vu cela : une milice étrangère entraînée et armée venir faire le coup de force par chez nous. Une vraie milice privée pour le coup. On veut privée comme une société de gardiennage… On a vu cela.

Comme on a vu aussi qu’il n’y eut aucune arrestation comme  il s’en produit pourtant couramment devant les stades pour n’importe quel hooligan, un peu rasé, un peu nervi, un peu nazi.Comme si quelqu’un quelque part s’était demandé si, après tout, tout cela n’était pas devenu normal. Essayez jamais d’entrer au foot avec une bate de base ball. Dans une usine on peut.

Le monde du travail, en effet, est désormais devenu un sport de combat. Et la bonne question, sans doute, ce n’est pas de savoir si cela nous surprend mais de se demander si cela nous étonne. Allez belle soirée et puis aussi bonne chance.

 

Paul Hermant

 

Article: LaPremiere.be

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