Le progrès humain vise à tuer le travail

Que ferons-nous des humains quand les robots feront le boulot ? s’interroge Eco89.

Je vous présente notre futur proche. Il s’agit de mademoiselle Ucroa HRP-4C, elle mesure 1,58 m. Elle est la première série de robots humanoïdes avec interface IA (intelligence artificielle). Elle est de nationalité «made in Japan». La commercialisation des premiers robots humanoïdes de grande série est prévue pour 2015.

Au-delà de la crise, une nouvelle révolution industrielle

Lorsque nous essayons de regarder un peu plus loin que les difficultés économiques actuelles, ce que nous voyons poindre, c’est l’ultime révolution industrielle : celle de la révolution robotique, qui est la dernière étape de l’évolution humaine.

En Chine, la société Foxconn a décidé de remplacer 500.000 ouvriers – pourtant bien peu chers – par des robots. Les coûts d’utilisation des outils robotiques baissent à un tel point qu’il est désormais plus rentable d’utiliser un robot qu’un ouvrier «low cost». Au Japon, la société Panasonic vient de créer une usine flambant neuve de 15 hectares, produisant 40% des dalles d’écrans plats fabriquées dans le monde (pour une valeur de 2 milliards de dollars par mois) ! Cette usine entièrement automatisée fonctionne avec une quinzaine de salariés…

Cela signifie qu’un mouvement de relocalisation naturel est à prévoir dans les prochaines années, les délocalisations ne se justifiant plus par un différentiel de coût, le prix d’exploitation d’un robot en France ou en Chine étant sensiblement identique. La conséquence est que ce phénomène de relocalisation aura un impact sur les balances commerciales et réduira les déséquilibres financiers (ce qui est déjà une bonne nouvelle) mais n’aura aucun impact, ou marginal, sur l’emploi.

L’agriculture préfigure le monde industriel de demain

Nous rentrons dans une phase ou nous pouvons et savons produire quasiment sans intervention humaine. Il s’agit de la même situation que celle que nous avons vécue dans l’agriculture, qui occupait 60% de la population active et qui a réussi, grâce à la mécanisation, à décupler les rendements et la production en n’employant plus que 2% de la population.

D’ici cinq ans, nous saurons produire encore plus, sans emploi. Nous relocaliserons… sans emploi. Nous pouvons anticiper une vague de destruction d’emplois industriels sans précédent. Et les gens, dans tout ça ?

Les tenants du progrès technologique expliquent depuis plus de trente ans que les formes d’emploi changent et qu’il ne s’agit que d’adapter les individus à la nouvelle économie de la connaissance. Ce faisant, ils nient les évolutions que nous voyons tous. Ils nient une réalité évidente.

Le chômage de masse augmente depuis le début des années 80. Et cela va s’accélérer :
• non, le progrès technologique n’est plus synonyme de création d’emplois, ce qui ne doit pas être confondu avec la création de richesse ;
• non, le progrès technologique et la société de la connaissance avec des postes à forte valeur ajoutée ne sont pas accessibles à tous. Nous n’avons pas tous les capacités, ni l’intérêt d’ailleurs, pour devenir ingénieur ;
• non, tout le monde ne peut pas être formé et il faut le dire pour ne pas tomber dans cette hypocrisie malhonnête ;
• non et cent fois non, une caissière de chez Carrefour remplacée par une caisse automatique ne pourra (presque) jamais devenir astrophysicienne, même si elle bénéficie des 100 millions d’euros de budget formation supplémentaire accordé à Pôle Emploi par le président Sarkozy.

Que fait-on de tous ceux qui ne sont pas des génies ?

Le corolaire à cette évidence que tout le monde préfère nier c’est : que fait-on ? Que fait-on des faibles en maths ? Que fait-on de ceux que je vois tous les jours et qui savent à peine lire et écrire malgré un bac en poche ? Que fait-on de tous ceux qui ne sont pas des génies ?

A ce premier élément se rajoute évidemment le fait que la révolution Internet n’a pas encore produit tous ses effets de compétitivité. L’exemple par la banque de détail, qui maintient des réseaux qui coûtent extrêmement chers alors que l’ensemble des opérations (y compris celles de crédit) peuvent être automatiquement ou presque réalisées à distance. Voilà une «économie potentielle» de 500.000 salariés rien qu’en France. Il en est de même avec les caisses automatiques qui commencent à être déployées dans les hypermarchés.

Imaginez votre future femme de ménage

Revenons à notre amie Ucroa. Imaginez un forcené armé : les forces d’assaut utiliseront vite une Ucroa pour passer la première. Imaginez des pervenches Ucroa : les amendes pourront être distribuées 24 heures sur 24 (ce qui aura un effet bénéfique sur les finances exsangues de notre pays). Imaginez un senior en grande dépendance : une Ucroa programmée pourra être une auxiliaire de vie attentive et corvéable à merci. Imaginez votre femme de ménage transformée en «robotte» : le ménage effectué en permanence, les courses faites, la maison parfaitement rangée, la vaisselle lavée en temps et en heure, et le repassage qui ne serait plus une corvée. Je serais le premier acheteur de l’Ucroa femme de ménage, ne trouvant aucun épanouissement particulier dans ces tâches.

Où que l’on regarde, la bataille pour l’emploi, dans son acceptation actuelle, semble définitivement perdue. Avant que ce phénomène ne se matérialise complètement, que la robotique et l’informatique donnent toute leur ampleur, nous nous enfoncerons dans un chômage structurel de plus en plus important, avec de moins en moins de salariés, de moins en moins de consommateurs solvables, de plus en plus de dépenses sociales, le tout dans le cadre d’une crise systémique mondiale.

Le progrès humain vise à tuer le travail

De façon plus philosophique, lorsque l’homme s’est vu chassé du jardin d’Eden (on n’est pas obligé d’y croire, c’est juste pour les besoins de la démonstration), il s’est vu condamné au travail et au labeur. De l’invention du feu à celle de la roue, du palan à la grue, de la machine à vapeur au moteur à explosion, le génie humain a toujours cherché à faciliter le travail de l’homme, à le rendre moins pénible… jusqu’à ce que notre génie humain nous permette enfin de ne plus travailler. Car l’aboutissement de cette créativité est bel et bien la suppression même de la notion de travail et le retour au «Paradis».

Mais avant cela, avant cette fin du travail, il y aura une nouvelle bulle, celle de la robotique, des start-up qui fabriqueront et commercialiseront ces robots, des start-up de l’intelligence artificielle qui les rendront presque «futés». Lorsque cette bulle explosera dans quelques années, il nous restera cinq à dix ans avant que l’ensemble du monde adopte ces nouvelles technologies au quotidien.

Alors, à ce moment-là, il faudra imaginer à quoi pourra ressembler le monde d’après, le monde où le travail n’existe plus car il sera effectué par des machines aussi performantes que nous. Que ferons-nous ? Comment le ferons-nous, avec quels modes de répartition de la richesse et sur la base de quels critères ?

L’ère du travail ne cessera pas à cause de la disparition de tout travail, mais par sa raréfaction. Les millions de chômeurs à travers la planète peuvent témoigner que le processus est déjà bien entamé.

(Source : Eco89)

 

Article: Actu Chômage

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