L’Onem me fait marcher, le Forem joue avec mes pieds (2)

 

 

Mardi passé, Eric a laissé un message vidéo sur ce blog, message qui annoncait une longue marche.  

  

Il a du écourter son périple.

 

Il revient aujourd’hui dans mon bureau avec une tendinite, quelques photos et un texte.

 

A lire l’extrait qui suit, « Maman-nature m’offre mon souper. Au menu : soupe d’orties et d’égopodes, la gentille dame a fourni l’eau et moi le cube de bouillon. On n’est pas des sauvages ! En dessert une poignée d’oxalis. Je n’ai pas retrouvé d’ail aux ours, dommage. », on se demande vraiment si Eric a la moindre capacité à devenir un jour accompagnateur nature.

 

Il me dit un sentiment d’échec. Je lui réponds que personne n’est à l’abri d’une tendinite. 

 

Je n’y vois pas un échec. J’y vois une démarche d’homme debout.

 

 

Voici son récit

 

 

Vincent

 

 

 

 

 

 

 

On n‘est pas des paumés.  

 

 

25/05. 21h15. Retour à Arlon. C’est pas le pied.

  

Allons directement à la case départ sans passer par la case travail et sans toucher 887,67€  

 

Mardi dernier je vous faisais part ici même de mon désaccord avec les méthodes arbitraires de la gestap’Onem et de l’obligation qui m’était faite de me démerder pour revenir de Marche à Arlon. Parce que j’étais dégoûté et en colère j’ai commis une première erreur : le jour « J » n’était pas le jeudi mais le vendredi 20. Ce n’était pas grave en soi et n’avait aucune influence sur les tenants et les aboutissants, selon la formule consacrée. 

  

J’ai profité du délai supplémentaire pour me rendre au CPAS et solliciter la somme qui me manquait. Coup de bol je suis arrivé le premier devant la porte (8h15), quelques minutes plus tard d’autres personnes arrivaient prendre leur place dans la file. J’ai pensé à ces images en noir et blanc de la grande crise étatsunienne des années1930 et des files devant la soupe populaire.



À 9h ouverture de la porte, je me présente au réceptionniste, et suis très vite reçu par une assistante sociale ; agréable surprise, je la connais et sais qu’elle mérite le nom de travailleuse sociale : nous avons travaillé ensemble dans le passé (2 projets communs entre mon ancien employeur et le CPAS), nous sommes rendu mutuellement des services d’ordres privés (j’ai gardé ses enfants, elle m’a aidé à déménager,…) c’est de bonne augure. Je ne lui fais pas part de mon projet, ne demande qu’un seul trajet de train.  Elle m’invite à patienter et se rend chez le président. Elle revient avec un billet de train A/R Arlon-Marche et une proposition d’aide de 25€ remboursables. Je refuse de me mettre à dos une dette supplémentaire et lui dis que je crains de devoir revenir la voir dès que j’aurai des infos de l’Onem.

 

Je n’ai pas demandé un billet aller-retour et ma décision est prise : j’affirmerai mon désaccord vis à vis de l’arbitraire.



Est-ce comme ça dans tous les CPAS ? Tout le monde a-t-il la chance que j’ai eue ? Pourquoi être privé d’un droit pour être obligé d’en mendier un autre ?

 

Une dernière chose sur la case CPAS et on jette les dés pour la case suivante. Mon ex-collègue à ôté sa casquette d’assistante sociale pour me dire qu’il y avait un malaise sur la région d’Arlon et qu’elle voyait chaque jour de plus en plus de nouvelles personnes exclues de leurs droits à la protection contre le chômage. 

 

Seulement sur Arlon ?

 

 

Je joue : double 6. Case chez moi, la veille du départ.

 

 

Je m’entraîne au maniement de l’appareil photo qui m’a été aimablement prêté et surprend Madame la Présidente des TSE à s’endormir dans mon salon. Je plaisante : Gigi ne dors pas, elle prend très sérieusement des notes.  

 

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Un ami devait me prêter son filet de bivouac malheureusement, il ne le retrouve pas. Je profite du temps qu’il me reste pour organiser mon sac et terminer enfin le hamac que j’avais commencé il y a plusieurs semaines.  

 

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Mon BOB (Bug Out Bag – sac permettant de fuir d’une zone de crise) comme disent les survivalistes, est prêt. 12Kg, c’est très raisonnable, en sachant qu’il n’y aura, cette fois-ci, ni douche au camping, ni petit resto sympa. Tant pis pour la croissance économique locale, suis pas responsable de la volonté de l’Onem de promouvoir la décroissance.

  

Moi aussi, je suis prêt.  73Kg pour 1m73. Avec un peu de chance je vais laisser mon petit bedon de pré-quinqua sur les sentiers. Cool. Il me tarde d’être demain. Suis prêt, et ai la même sensation que si j’allais rentrer chez moi après une absence non désirée. Je plaisante avec ma fille Aurore, elle aussi TSE et lui dit que j’ai peur de partir ; elle me demande pourquoi et je lui réponds que j’ai peur de ne pas avoir envie de revenir. Je vais bien, j’emmerde la gestap’Onem et si le totalitarisme libéral l’emporte je suis partant pour prendre le maquis. J’ai déjà fait mieux : la « Gaume buissonnière », la « Transsemoisienne », « Laroche-Bouillon », le GR des 3F, etc. Cette fois-ci j’ai un délai à tenir, RDV à Habay le mercredi 25/05 à 08h00.

 

 

Je relance. Score exceptionnel : un 7 et un 5. Case Gare d’Arlon. 07h05 Vendredi 20/05. 

 

 

 

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Direction le quai n°3. Pas trop vite en cas de changement de quai de dernière minute. Départ à 07h18. Le train est à quai, j’y vais, je m’installe. 07H18 le train s’ébranle. Çà me fait rire : pour une fois que je ne paie pas mon billet, je n’ai pas droit à un supplément d’attente. Pas vu de contrôleur.

  

Le train en direction d’Herstal de 08h22 est déjà à quai. Il existe un euphémisme pour nommer les contrôleurs : accompagnateur. C’est comme à l’ONEm, là ils nomment les contrôleurs « Facilitateurs ». va falloir relire Orwell. Une demoiselle a un petit souci, l’accompagnatrice lui dit qu’elle a le temps : tant que le signal ne passe pas au vert le train ne démarrera pas. Elle rassure la voyageuse, le tout avec le sourire.

  

Le message habituel des contrôleurs est plutôt du genre : m’en fous, on démarre à l’heure. Je complimente l’accompagnatrice et lui suggère de donner des cours d’amabilité à ses collègues. Nous bavardons quelques instants et c’est la première belle rencontre humaine de mon périple. Je me dis qu’il faudrait des gens comme elle à l’Onem mais ça risquerait de la corrompre.

 

Je lui présente mon billet. 

   

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Pourquoi ce billet comporte-t-il la mention CPAS alors que la plupart des autres mentions sont chiffrées ? C’est inutile et vexatoire.

 

Lui aurais bien laissé mon téléphone et mon e-mail sans ça.

 

 

Roulez petits dés. Pas terrible comme score. Case Forem Marche-en-Famenne.

 

 

C’est pas évident de traverser Marche à pied surtout que je suis pressé et que le plan joint à l’invita-convocation ne concerne que les automobilistes.  Je suppose que toutes les personnes en formation au Forem viennent en voiture.  

 

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Heureusement, j’avais préparé mon parcours mais pas prévu les travaux qui m’ont sérieusement ralenti.

 

Je suis donc arrivé au Forem avec quelques minutes de retard mais ça n’a pas posé de problème. 

   

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L’instructeur a l’air sympa, il explique le déroulement de la formation. Décidément, ça m’intéresse vraiment. À la pause de 10h il me prend en entretien particulier parce que je n’ai pas été averti de la séance du 2 ou du 3 mai. Normal, j’avais fait cet entretien à Libramont il y a quelques mois et c’est suite à ça que je suis là aujourd’hui.

 

Je lui expose mon projet professionnel de guide-animateur-accompagnateur, je lui fais part de mes expériences et de mes compétences que j’aimerais faire reconnaître.

 

Il ne va pas me prendre dans ce programme de formation (aie!) mais il existe à Dinant une formation  qui correspond à mes attentes. Il va me « mailer » les infos. Ah bon, jusqu’à présent le Forem m’a affirmé que çà n’existait pas en Belgique, que ce qui se rapprochait le plus de mon désir était la formation en tourisme à Marche. Qui a lu Kafka ?

  

10h27 je quitte le Forem.

 

  

 

Alea jacta est. Le sort en est jeté. Enfin la case rando.  

  

  

  

Je cherche le GR (circuit de Grande Randonnée) 577 en direction de Hotton. Je quitte la ville, le bruit, la puanteur des bagnoles.

Nous avons tous une image du bonheur, la mienne ressemble à ça. 

 

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Cherchez le panneau Onem vous ne le trouverez pas. Il fait beau et chaud. Chercher la contrepèterie vous la trouverez sûrement. À chaque fois que j’entre dans un village je cherche un cimetière ou la maison communale pour trouver un point d’eau potable et remplir mon bidon. Premier réapprovisionnement dans le village de Verdenne.

 

 

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Le nom du resto (les pieds dans le plat) a été choisi spécialement pour qu’aujourd’hui je passe à côté. Je continue. Toujours en direction de Hotton. Je marche, je me sens bien, je me repose.

 

Ben oui, je me repose de cette vie de merde qui m’est imposée.

 

Quand j’entre au Forem je dois prouver que je me soumets à leurs exigences. 

  

Quand je rentre à l’Onem je dois prouver que je me soumets à leurs exigences.  

 

Ici je n’ai rien à prouver. Juste à être. 

  

Voilà un mois que je n’ai pas touché mon chômage, parce que le Forem a transmis à l’Onem des informations qui font de moi un coupable. La présomption d’innocence ça vaut pour tous les êtres humains, égaux en droits et en dignité. Mais pas pour les TSE qui ne sont pas des êtres humains mais des parasites qu’à défaut de pouvoir, jusqu’à présent, exterminer, il convient d’exclure. 

 

Mais là, à cet instant, je m’en fous, je marche.

  

  

Eric

 

 

(A suivre).

 

L’Onem me fait marcher, le Forem joue avec mes pieds (3)

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