Contrôler les chômeurs, un jeu dangereux ?
ALBIN,DIDIER
Emploi Une étude universitaire en montre l’intérêt
Dans le monde syndical, les résultats de la dernière étude de l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) de l’UCL et de l’Université de Gand font l’effet d’une douche froide. Pendant trois ans entre 2004 et 2006, des chercheurs ont étudié l’impact du contrôle de la disponibilité des chômeurs auprès des 24-29 ans. En Flandre, il apparaît que la mesure améliore le taux de remise au travail de près de 10 %. On passe d’une moyenne de 35 à une moyenne de 45 %. C’est un peu moins en Wallonie, mais l’impact de l’activation s’établit quand même à une hausse de 6 % du total des retours à l’embauche.
L’étude en déduit que ça marche, quelle que soit la région où le dispositif s’applique. A cette nuance près : un système de contrôle de recherche d’emploi est plus efficace dans un marché du travail où les offres d’emploi sont abondantes. Il n’en faut pas davantage pour faire bondir le permanent interprofessionnel en charge des travailleurs sans emploi de la régionale CSC de Mons-La Louvière. Dans une sous-région du Hainaut où le chômage atteint jusqu’à 30 % de la population comme c’est le cas à Colfontaine, Mathieu Diku s’inquiète des recommandations de cette étude qui plaide pour une accélération des contrôles.
« En plus de 10 ans, nous n’avons pu observer significativement une baisse du chômage dans notre régionale et les chiffres paraissent comme “incompressibles” avec pour conséquence l’établissement progressif de ghettos, de générations de chômeurs. D’autres observations sur la création d’emplois démontrent que ces dernières années, le nombre d’emplois créés à temps plein n’a pas augmenté proportionnellement à la population active et que, si augmentation d’emplois il y a eu, c’est par l’accroissement des contrats précaires (temps partiel, intérim, win-win…). »
Fragilisation
Par ailleurs, le permanent observe que sur Mons-La Louvière, les perspectives réelles d’embauche sont rares. « Les peu qualifiés restent les premières victimes d’un plan qui a montré ses limites dès sa mise en œuvre. Un contrôle anticipé n’aura pas d’autre effet que de fragiliser davantage les plus vulnérables. »
Le service TSE de la FGTB de Charleroi confirme. Le siège carolo de l’Onem se montre très sévère en termes de sanctions. En moyenne, 210 hommes et femmes sont convoqués chaque jour pour s’expliquer sur leurs démarches de recherche d’emploi. Ont-ils répondu à des offres, envoyé des CV, comment se sont-ils comportés face à des employeurs potentiels ? Il leur faut apporter des preuves de leur activation. Les entretiens durent de 30 à 40 minutes sur un plateau où travaillent une vingtaine de facilitateurs. Le chômeur doit faire attention à ce qu’il dit, à ne pas être en litige avec l’Onem. Sous peine de se voir exclure de ses droits au chômage temporairement ou définitivement.
Entre 2003 et 2008, la part mensuelle des sanctions temporaires chez les chômeurs complets indemnisés – la « fréquence de sanction » – a quasi triplé. En 2009, elle était de 23 % chez les demandeurs de moins de 50 ans.
De l’emploi et de l’emploi de qualité pour tous plutôt qu’une agitation inefficace dans le but de mettre la pression sur les demandeurs d’emploi : telle est la revendication syndicale. La CSC Mons-La Louvière et son groupe de militants entendent le faire savoir.
les chiffres
40.000 entretiens
de contrôles d’activation de la recherche d’emploi sont effectués chaque année par le siège régional de l’Onem de Charleroi.
50 %
C’est la part de demandeurs d’emploi inoccupés de moins de 50 ans qui a retrouvé du travail entre 2004 et 2008, grâce à une conjoncture favorable
39 %
des demandeurs d’emplois contrôlés dans la région de Mons-La Louvière sont sanctionnés au terme de leur dernier entretien.
Article: lesoir.be